10/10/2010
Un lapin malin a trois terriers.
Mais où est donc le lapin ?, le deuxième titre de la collection en quatre mots, est la première publication de la jeune artiste Sophie Roze, déjà distinguée pour son film d’animation Les escargots de Joseph. Nous avons eu beaucoup de plaisir dans cette collaboration où l’illustratrice nous régale avec des scènes drôles à souhait reflétant parfaitement l’état d’esprit de notre héro espiègle, Dan le lapin.
Ce livre présente deux histoires résumées chacune par une expression proverbiale en quatre mots chinois appelée chengyu. L’expression « Jiao tu san ku » vieille de plus de deux mille ans et mise en exergue par le deuxième épisode de l’album, est l’une des plus connues des Chinois.
Jiao tu san ku 狡兔三窟 peut se traduire littéralement en « Un lapin malin a trois terriers ». Comme beaucoup d’autres chengyu, c’était à l'origine une métaphore employée par un stratège auprès d'un prince à l’époque des Royaumes combattants (476-221 B.C.). En l’occurrence, le stratège répond au nom de Feng Xuan et le prince du royaume de Qi s’appelle Mengchangjun. En effet, le stratège Feng ne s'est pas contenté de conseiller son maître ; il a aménagé trois « refuges » pour Mengchangjun sans obtenir son accord en amont. Quel esprit d’initiative !
La suite de l’histoire est prévisible : Mengchangjun a pu échapper à une série de calamités et de persécutions grâce aux repaires préparés à l’avance par son conseiller clairvoyant.
Que les Chinois aient présent à l’esprit cette nécessité de clairvoyance est témoigné par plusieurs chengyu similaires, mais aussi par un caractère emblématique : xiong 凶 traduit communément en « mauvais augure » :
Quasiment inchangé depuis trois mille ans, le caractère 凶 se compose de deux parties, dont l’une X est la représentation d’une marche régulière progressant selon un rythme alternatif, comme jadis l’avancée d’un faucheur dans un champ, et l’autre U, l’évocation d’une sorte de fosse dans laquelle la forme en X semble enserrée. L’association des deux signes montre un flux régulier qui, au lieu de s’écouler librement et de manière productive, est tombé dans un trou, à l’intérieur duquel il s’envase et pourrit.
Cyrille J.-D. Javary, Le discours de la tortue, p. 47, éd. Albin Michel 2003
Ainsi, pour un esprit chinois, la fermeture - dans le sens de « l’étau se resserre » - est le présage par excellence d'une situation néfaste et potentiellement mortelle car sans issue. Vivre longtemps et heureux, cela implique avant tout de s'éloigner de telles éventualités fâcheuses.
Image extraite de l’album Mais où est donc le lapin ?, éd. HongFei Cultures, illustré par Sophie Roze.
Ecouter une sélection de chengyu sur le site de la revue Planète chinois
13:04 Publié dans HongFei : Ressources | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : javary, sophie roze, mais où est donc le lapin, chengyu, planète chinois | Facebook |
18/12/2009
Voyage interplanétaire (1)
Le 11 décembre à 18h à la librairie Le Phénix, nous avons assisté à la présentation du deuxième numéro de « Planète Chinois » : la revue de tous ceux qui étudient le chinois (et découvrent une culture), fruit d’une collaboration de qualité entre la prestigieuse maison d’édition chinoise Shangwu Yinshuguan et le CNDP (Centre national de documentation pédagogique). Le périodique trimestriel, riche en articles, photos, reportages, initiations à la langue et l’écriture chinoises, se prolonge avec un site internet qui fournit gratuitement des supports multimédia interactifs pour transporter le lecteur sur une autre planète, sans bagage (ni émission de CO2).
Cette belle publication en main, je cherche des mots pour vous inviter à en faire l’expérience. Soudain, ma pensée fait un grand bond en arrière. En 1989 (il y a vingt ans, et oui), je me suis inscrit à l’Alliance Française de Taipei pendant deux trimestres pour commencer mon apprentissage de la langue française.
C’était un cours du soir, deux ou trois séances par semaine. Mon premier professeur s’appelait Brigitte et le deuxième Valérie, toutes les deux jeunes, belles et fort sympathiques. Pour rendre mes devoirs rédigés en français, j’utilisais mon PC ; les lettres avec accent devaient être saisies une à une avec la fonction « insérer des caractères spéciaux ». C’était fastidieux mais j'étais fier de présenter mes compositions à Valérie (avec Brigitte, je n’avais pas encore le niveau pour écrire).
… Je m’éloigne un peu du sujet qui est la revue « Planète Chinois ». Mais en effet, elle me rappelle la méthode française « Sans Frontières » pratiquée à l’Alliance Française en 1989. J’y ai découvert l’existence fictive d’un monsieur (dont j’ai oublié le nom et prénom), pianiste habitant Place Contrescarpe à Paris. Celle aussi de plusieurs jeunes Suisses voyageant en Bretagne ayant obtenu l’aimable permission d’un agriculteur de camper sur son champ d’artichauts ; pour le remercier ils lui offraient des chocolats suisses avant de repartir.
Trois ans plus tard, j’ai atterri sur la Planète Français. Qui l’eut cru ?
Seul, empruntant le métro parisien, sous un ciel gris, je suis venu voir de mes propres yeux cette fameuse place Contrescarpe (hélas je ne saurai pas vous dire à quoi ressemble un champ d’artichauts en Bretagne ; je n’en ai jamais vu).
(à suivre)
09:15 Publié dans journal d'éditeur | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : cndp, chine, planète chinois, alliance française, le phénix | Facebook |