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02/08/2009

Nezha, l'enfant-dieu

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titre : Nezha mon frère 我家有個風火輪

auteure du texte : ZHANG Manjuan 張曼娟

éditions : Tianxia 天下文化

année : 2006 Taipei

langue : chinoise

 

C’est avec plaisir que j’ai parcouru les cent pages d’un seul trait. Le récit, inspiré d’un épisode du roman L’Investiture des dieux (XU Zhonglin 許仲琳, 16e siècle), raconte la vie de Nezha 哪吒, l’unique enfant-dieu dans le panthéon chinois.

 

Nezha est le troisième fils de LI Jing, un général qui a contribué à la fondation de la dynastie des Zhou vers le 11e siècle avant J.C. Mais il est surtout l’incarnation d’un disciple du maître taoïste Taïyi Zhenren. Sa naissance est si peu naturelle que LI Jing a voulu lui ôter la vie sur le champ. Depuis, cet enfant à la fois innocent et puissant ne cesse de causer des ennuis à son père en offensant les Rois dragons malgré lui, jusqu’au point d’orgue où il « rend sa chair à sa mère et ses os à son père » et se donne la mort.

 

L’histoire aurait pu s’arrêter là si LI Jing n’avait pas profané le temple érigé par la mère en mémoire de Nezha. Ressuscité par le maître taoïste, Nezha revient combattre LI Jing qu’il ne reconnaît plus comme son père.

 

L’auteure ZHANG Manjuan est une écrivaine confirmée publiée depuis plus de vingt ans. Fascinée par les histoires fantastiques dans la tradition littéraire chinoise, et consciente de la nécessité de faciliter l’accès à cet héritage pour la jeune génération, elle a choisi quatre récits classiques qui, sous son plume imaginatif, gagnent une « second life ». L’intention est louable et le résultat convaincant.

 

Un bel exemple de « transmission créative ».

 

24/05/2009

La poésie naît d’un besoin naturel du beau et du plaisir

1.jpgQu’est-ce que c’est, la poésie ?

 

La poésie est une expérience esthétique, une expérience plaisante des mots.

 

La poésie est-elle la liberté totale ?

 

La poésie est régie par des règles de rimes, parfois, et de rythmes, toujours ; elle n’est pas une parole sans règle. Le charme de la poésie réside dans la force créatrice des poètes à s’affranchir de ces règles et à nous proposer une expérience de mots inattendue mais ô combien juste par rapport à notre vécu.

 

La poésie se caractérise-t-elle par le jeu du sens des mots ?

 

Au-delà du sens, la poésie c’est aussi un « son rythmé » quand elle est lue, et le mouvement des traits quand elle est écrite. En Chine on écrit et on peint avec le même outil qu’est le pinceau. La composition spatiale des mots qui composent un poème peut véhiculer un élan et émouvoir un lecteur aussi bien qu’une peinture. La poésie s’apprécie ainsi par sa dimension physique également.

 

Les ouvrages de poésie sont-ils délaissés par le lecteur d’aujourd’hui au profit des livres d’images ?

 

Les ouvrages de poésie et les livres d’images ne sont pas antinomiques. L’image peut être un allié de la poésie. La calligraphie chinoise en est un exemple. La couverture d’un ouvrage de poésie, aussi sobrement conçue soit elle, est porteuse d’une esthétique qui prépare le lecteur à entrer dans un monde autre.

 

Comment donner du goût au lecteur pour la poésie ?

 

Pour que le goût d’un homme soit cultivé, il lui est indispensable d’avoir goûté à des mets exquis préparés par un grand chef. Il saura alors distinguer ce qui est excellent de ce qui est médiocre. En littérature et en poésie, il n’en va pas autrement. En mettant à la portée des enfants une « bonne » littérature (comme les Chinois mettent à portée des enfants les poèmes classiques de vingt caractères, avec des niveaux de lecture multiples), nous les aidons à exiger du beau et du plaisir dans leurs lectures à venir. 

 

 

[mémo de quelques idées émises lors de la table ronde sur « Les spécificités de la création d’ouvrages de poésie et leur réception », au dernier salon du livre du Pouliguen. Merci à Frédérique Manin de l'association Le sel des mots d’avoir rendu possibles ces échanges stimulants avec un auditoire enthousiaste et les éditeurs de Sac à mots et Littérales.]

 

image : couverture de Poésie chinoise. texte de François Cheng / calligraphies de Fabienne Verdier. Ed. Albin Michel 2000.

01/05/2009

Partir

 

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… En «  lisant » Du côté de chez Swann et A l’ombre des jeunes filles en fleurs (version BD dessinée par Stéphane Heuet, par la force des circonstances), je sais que je le comprends, Proust. Symétriquement, je me sais compris. Ces dernières années la vie m’a amené à apprécier certaines choses qui, pour l'être, doivent être « vécues », peu importe l’intelligence d’un individu.

 

Mais, qui a vécu, qui n’a pas vécu ? Qui est au-dessus de tous pour estimer si un autre a, ou n’a pas, vécu ? Ainsi, je ne peux que parler pour moi-même et toute tentative de transformer ces propos en un précepte pour une vie heureuse serait illusoire. A Taipei, le dernier bestseller est le récit d’un jeune homme qui s’est aventuré dans les contrées reculées du Tibet. Le préfacier, un homme de lettre pourtant intelligent, est si emporté par son enthousiasme de l’aventure « extraordinaire » de l’auteur, qu’il enjoint tous les lecteurs à « partir ». Peu importe où, mais il faut partir... Comme si partir suffisait à transformer un homme médiocre en un homme de qualité. Comme si hors de ces aventures extraordinaires, la vie ne serait pas vécue.

 

Ce « partir » banalisé traduit plutôt une révolte contre le poids de la vie quotidienne. Ce qui importe selon moi, ce n’est pas « partir » mais de trouver la force de tenir tête au poids de la vie quotidienne. Un homme qui part en aventurier dans la jungle n’est pas forcément plus courageux que celui qui ne part pas, mais qui sait, lui, transformer ce qui lui est donné à vivre comme un cheminement – vers la beauté et la liberté.

 

Chun

Lettre à un ami

 

image : couverture de la version chinoise de « A la recherche du temps perdu : Combray »

auteur : Marcel Proust

illustrateur : Stéphane Heuet

traducteur : LIN Weijun

éditeur : Dala (Taipei 2003)

 

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Lilies-of-the-valley (muguets), photo prise ce jour dans le jardin d'une amie à Oxford.

 

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26/03/2009

Gardons le printemps à la maison

Printemps.jpg

Le printemps est arrivé !

… Où est le printemps ?

Frérot a beau chercher, il ne le trouve pas.

Dos au vent du sud il déroule la longue ficelle

Et demande au cerf-volant d’aller se renseigner.

 

(extrait de l’album Chants des Lucioles, éd. HongFei Cultures 2007)

 

Pour l’habitant de la vallée de la Marne, à hauteur de Champs, l’arrivée du printemps s’accompagne d’un présent providentiel, encore faut-il qu’il dispose d’une grande fenêtre lui offrant une vue panoramique de Paris la Ville-Lumière : le jour du solstice, le coucher de soleil tombe à pic sur la Tour Eiffel. Tel un baiser attendu et donné avec ardeur et bonheur, permis deux fois par an.

 

Le printemps est donc arrivé ! La nature renaît. Les boutons impatients se montrent déjà sur les branches d’arbres encore nues, tout comme les possibilités infinies de notre vie réclamant d’être réalisées.

 

Avec l’arrivée du printemps, se clôt ce blog ouvert l’année dernière. Je remercie sincèrement tous ceux qui l’ont visité et parfois y ont laissé des messages d’enthousiasme et d’encouragement, et livre une petite explication de ce changement appelé à s'effectuer.

 

Conçu comme un prolongement des albums de HongFei Cultures pour accompagner les lecteurs dans leur découverte de l’univers chinois, le contenu de ce « blog » est paru d’abord dans la rubrique « LECTEUR » du site internet de HongFei Cultures en mars 2008. En octobre dernier la rubrique est remplacée par ce blog, plus pratique d’utilisation. J’apprécie particulièrement la possibilité qu’offre celui-ci de liens multiples avec d’autres sites de référence, comme une maison agrémentée d’autant de fenêtres fleuries.

 

Avec mes obligations ces derniers mois, il m’est difficile d’accorder le temps nécessaire à l’entretien de cette jolie « maison ». A cela, nous avons trouvé une solution heureuse : c’est sur le blog de Loïc que j’écrirai désormais. Pour saluer l’arrivée du printemps, le meilleur endroit n’est-il pas ce singulier Pavillon du lac de l’Ouest ? Un bol de thé et la musique des chants d’oiseaux achèveront de créer le bonheur parfait.

 

Quant à cette maison, elle ne disparaîtra pas. Offerte à la Nature, elle sera habitée par le printemps, l’été, l’automne… et le printemps.

 

 

 

image : vue depuis ma fenêtre d’un jour du printemps 2004.

17/01/2009

Bon Vent d'Asie !

 

01 - Tanea

02 - Sara Comelli

03 - Virginie Rapiat 

04 - Marina Junius

05 - Lak-Khee Tay-Audouard

06 - Adrien Albert

07 - Laura Pellegrinelli

08 - Kloé Arsego

09 - Agnès Perruchon

10 - Aurélie Guarino

11 - Galou

12 - Monique Mazarguil

13 - Laura Aubert

14 - Lise Daulin

15 - Chloé du Colombier

16 - Paulinka

17 - Marianne Nicolas

 18 -

19 - Sandrine Kao

 20 - Coralie Saudo

 21 - Laurence Lubet Hamon

22 - Bobi+Bobi

23 - Isabelle Pellouin

24 - Yuko

25 - Catherine Nicolas 

  

Nos sincères félicitations aux illustrateurs ci-dessus

dont l'oeuvre a été sélectionnée par le jury.

  

»Suivez l'événement sur le site d'Asie en Lumières

 

 

12/01/2009

Vent d'Asie

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Un grand MERCI à tous ceux qui ont participé activement au concours d'illustration, lancé par l'association Asie en Lumières (dont les deux éditeurs de HongFei Cultures sont parmi les membres fondateurs) organisatrice du premier salon des littératures asiatiques qui se tiendra à Lognes (Marne-la-Vallée) le samedi 31 janvier prochain. 

 

Soixante illustrations sont réunies pour une première sélection qui interviendra ce soir : une tâche difficile pour le jury tant les propositions rivalisent d’originalité et de finesse d’exécution.

 

En attendant de révéler les projets finalistes au public, et d’abord aux enfants des écoles, nous espérons que cet événement aura incité chaque candidat(e) à « faire un pas » non seulement vers les cultures et sensibilités d’Asie, mais aussi vers la découverte d’une part de soi encore inexplorée. Qu’un voile se lève avec le vent d’Asie… 

07/01/2009

Bonne année 2009

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image : représentation d'un boeuf en papier découpé et coloré, acheté avec celle des onze autres animaux du zodiaque chinois lors d'une visite à la Grande Muraille près de Pékin en 2006.

27/12/2008

C’est quoi, une « expérience » ?

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Dans deux des dernières notes du blog, nous avons parlé d’une « expérience de lecture ». Mais, qu’entendons-nous par le mot « expérience », précisément ?

 

Comme le sens des mots est parfois mieux défini « en creux », voyons d’abord ce qui n’est pas une expérience. Par exemple, dans la plupart des cas, une évasion n’est pas une expérience. L’évasion, à l’occasion d’une lecture, s’apparente généralement à une parenthèse qui s’ouvre puis se ferme, dans un cours à peine perturbé de la vie. Après la parenthèse, on « reprend une vie normale » et ses habitudes. Quant à l’expérience, au contraire, on n’en sort pas indemne. Après une expérience, nous ne regardons plus le monde de la même manière qu’avant. Nous acquérons une nouvelle façon d’interagir avec le monde – une façon plus riche dans le meilleur des cas.

 

Une autre manière de définir l’expérience consiste à distinguer et contraster les deux sens du mot. Dans la langue anglaise, ce double sens s’exprime avec deux mots distincts : experience et experiment. Tandis que l’experiment renvoie à un protocole d'épreuve préalablement établi, éventuellement répété, par lequel on teste une théorie ou collecte de nouveaux objets d’observation, le mot experience met davantage l’accent sur une connaissance ou une sagesse qui ne s’obtient pas autrement que par un vécu, une pratique. Avec l'expérience, nous créons un sens à notre parcours au lieu de le trouver tout fait.

 

L’expérience se vit ainsi comme un processus ouvert qui stimule nos sens et libère notre esprit. Si, au début d’une expérience, le premier pas vers l’inconnu peut inquiéter, ceux qui suivent finissent par élargir nos horizons et nous permettre d’être mieux en phase avec le monde qui nous entoure. C’est dans cette perspective que nous invitons nos lecteurs à une « expérience de lecture » d’une littérature chinoise accessible aux enfants.

 

image : le mot « expérience » en deux caractères chinois

03/12/2008

Rencontre des cultures à Montreuil

Montreuil_vu-par-Ezra.jpgCe fut la première participation de HongFei Cultures au salon du livre et de la presse jeunesse à Montreuil, sur un stand individuel. Nous remercions tout particulièrement les amis qui nous ont aidés à mettre en place cet espace accueillant : Corinne et Thierry par leur disponibilité en transportant les meubles et les livres, à l’aller comme au retour ; Corinne nous ayant accompagnés tous les jours sur le stand avec sa longue expérience de libraire ; sans oublier Laurian et Philippe qui nous ont prété du mobilier esthétique, pratique et parfaitement aux normes de sécurité.

 

Six jours ont passé comme une flèche. Tous les illustrateurs collaborant avec HongFei Cultures nous ont fait l’honneur d’être présents pour des rencontres-signatures. De nouvelles connaissances ont été nouées avec des illustrateurs et des éditeurs, très importantes pour la progression en qualité de notre offre éditoriale.

 

La rencontre avec le public, gratifiante, reste très instructive pour affiner notre proposition d’une « expérience de lecture » de la littérature chinoise augmentée d’images créées par des illustrateurs de France. En effet, dans la sélection des textes chinois comme dans le choix des artistes français, nous avons voulu accompagner les lecteurs sur un sentier peu pratiqué envers une culture vivante partagée par plus d'un milliard de Chinois. Pour les albums déjà publiés, et pour ceux à venir, nous nous perfectionnons chaque jour pour être à la hauteur de cette intention.

 

Chers lecteurs, à notre mesure nous formulons cette invitation à découvrir la culture chinoise dans le respect des sensibilités du jeune public français. Lors de vos visites sur notre stand, vous vous êtes montrés sensibles à ce « respect » par un simple regard lumineux ou un sourire rayonnant. Croyez bien que c’est une reconnaissance très précieuse pour nous.

 

En attendant la parution de nos prochains albums au printemps 2009, j’espère que chaque lecture de nos livres et chaque visite de nos blogs et de notre site vous procurera le même plaisir de rencontre.

   

 

crédit photo : Ezra et Joël

22/11/2008

Autour des journées du livre jeunesse d’Aubagne

poster-Aubagne.gifHabitué à prendre les transports en commun dans la région parisienne, je n’avais pas compris pourquoi l’organisateur prévoyait de nous accueillir à la gare Saint-Charles de Marseille au lieu de la gare d’Aubagne. Il ne m’a pas fallu grande chose pour en comprendre la raison : le TGV au départ de Paris est parti avec 50 minutes de retard, avec changement de rames (avant le départ ; cela peut être considéré comme une chance.) Soyons raisonnables : réussir une correspondance en arrivant à Marseille relève d’une gageure.

 

Ce retard finalement sans conséquence fut suivi de trois jours et demi de vie intense autour du salon. Nous nous sommes très vite sentis bien à l’aise avec Mme Véronique Paris (l’organisatrice et responsable de la médiathèque Marcel Pagnol d’Aubagne), Mme Roche (libraire de L’Etoile bleue) ainsi qu’avec Laurianne (étudiante-stagiaire de l’IUT d’Aix-en-Provence) et Maya (animatrice d’ateliers et de forums de qualité). A la différence des salons auxquels nous sommes habitués jusqu’ici, celui d’Aubagne propose un encadrement et une répartition de rôles qui permettent aux éditeurs que nous sommes de ne pas rester cloués sur notre stand, mais de papillonner entre les ateliers, conférences, expositions et interviews. Merci à vous pour cette respiration si agréable et nécessaire pour l’exercice de notre métier.

 

Loïc et moi avons assisté à un atelier avec un titre en forme de question posée aux trois éditeurs intervenants (Didier Jeunesse, Rue du Monde, Sarbacane) : « Quels sont vos critères pour décider de la parution d’un album ? » J’ai eu le plaisir de partager ces moments stimulants avec Maryse (allia Ezra) et Joël, et vous renvoie sur le site de Karibencyla tenu par Joël pour un compte rendu de la teneur des propos. 

Notre retour à Paris, dimanche soir, a coïncidé avec la fin des votes pour le quatrième concours « La lune et les étoiles » organisé par Morgan sur son blog « De papier (de soie), d’encre (de Chine) et de couleurs (si nuancées) ». L’album publié et recommandé par HongFei Cultures, Marée d’amour dans la nuit l’a remporté avec beaucoup (!) de voix. Merci à tous ceux qui y ont participé activement. Je passe relativement peu de temps sur l’internet pour y glaner des actualités, et ne connaissait pas trop les tenant et aboutissant du concours. Maintenant je crois voir mieux : grâce à lui, beaucoup de personnes autour de nous sont sensibilisées à la production foisonnante des albums illustrés pour enfants, tandis que j’ai (re)découvert le blog de Morgan, riche et délicieux.

»article sur HongFei Cultures paru dans La Provence le 15 novembre 2008

06/11/2008

Réflexions d’un voyageur en Angleterre

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Récemment, la lecture d’un article de journal m’a donné envie de partager certaines réflexions, qui peuvent intéresser tout lecteur attentif et pas uniquement les spécialistes de l’urbanisme.

 

Il s’agit de l’article intitulé « Le prince Charles veut exporter son modèle d'urbanisme "à l'ancienne" » paru dans Le Monde du 26 octobre 2008. Un séjour de deux ans à Oxford m’a rendu sensible aux reportages sur l’Angleterre, d’autant plus qu’en France où je vis, les gens n’affichent pas l’amour qu’ils portent pour leurs voisins d’Outre-Manche.

 

Ce qui arrive souvent à une chose mal connue, c’est qu’elle soit adorée ou détestée pour de mauvaises raisons. C’est visiblement le cas du mouvement de renaissance urbaine animé par le Prince Charles, incarné dans la réalisation de Poundbury dans un coin paisible au sud-ouest du pays. En terme de morphologie urbaine, Poundbury n’est pas une ville proprement dite mais ressemble plutôt à un nouveau quartier d’une ville existante (Dorchester).

 

D’aucuns critiquent cet urbanisme de façade et dénoncent la « nostalgie » déconnectée de notre époque. D’autres admirent l’ambiance du « village urbain » presque magique de ce lieu : oui, c’est du faux-semblant mais c’est tellement bien fait ! Et pour un esprit pragmatique qui prévaut en Angleterre, l’effet supposé bénéfique du projet sur les relations sociales peut tout justifier. 

 

J’ai eu l’occasion de passer quelques moments à Poundbury en 2004, un carnet de croquis à la main. A tant me voir dessiner, une habitante s’est mise à bavarder avec moi, s’excusant de ne pas avoir le temps de m'offrir un afternoon tea. Un endroit charmant qui inspire l’hospitalité, non ?

 

Quatre ans après, je vous livre le souvenir que cette visite m’a laissé : là-bas, tout est impeccablement dessiné, mais rien n’est « mesuré ». Je le dis avec un peu de regret.

 

Je me perds à Poundbury qui n’est pourtant pas très étendu. Des bâtiments plus ou moins grands, installés à différents endroits de la « ville », sont censés jouer le rôle de repères, et aider les gens à s’y orienter, se l’approprier. Toutefois, quand ces grands bâtiments sortent de son champ de vision, un flâneur ne sait plus s’il est proche ou loin du centre.

 

A l’opposé, dans une ville anglaise moins « artificiellement constituée », le flâneur le sait d’instinct : quand on est loin d’une high street (grande rue), les maisons sont plus espacées. Quand les maisons se resserrent, c’est qu’on se rapproche d’un centre. Voilà la « mesure » vivante résultant d’un jeu collectif de l’économie urbaine, une mesure non dessinée qui faisait défaut à Poundbury.

 

L’urbanisme de Poundbury constitue-t-il un modèle à généraliser et exporter ? Toujours est-il que le cadre très agréable de Poundbury a créé un effet non voulu : parmi ses habitants on compte plusieurs personnalités prestigieuses proches de la Cour royale. Le prix d’immobilier y est devenu inabordable pour le commun des mortels.

 

Moralité : derrière un article de journal, il peut y avoir toute une histoire à découvrir et à raconter (comme derrière chaque album de HongFei Cultures).

 

 

Source de l’image : Erling Okkenhaug

Pour plus d’images : cliquer ici 

 

 

20/09/2008

« 100 mots pour comprendre les Chinois », de Cyrille J.-D. JAVARY

EL_CB_100motsJavary.gifMa rencontre avec Monsieur JAVARY a quelque chose d’un « coup de foudre ». C’était à la Maison de thé de Mademoiselle LI, au Jardin d’Acclimatation de Paris en mai 2008, lors d’une conférence qu’il donnait sur la civilisation chinoise et le rapport à la modernité de cette vieille nation.

 

J'étais le seul Asiatique de l’audience ; probablement le plus exalté aussi du fait de ma qualité chinoise. Cela n’était pas une surprise pour le conférencier expérimenté : beaucoup de Chinois avant moi l’ont déjà félicité, et il y en aura beaucoup qui le feront après.

 

Paradoxalement, c’est un Chinois qui peut le mieux reconnaître la valeur de l’œuvre et de la pensée de Monsieur JAVARY, alors que son écrit est d’abord lu par un public français désireux de connaître la Chine. Pour être plus précis, c’est en tant que Chinois vivant en Occident que je me sens particulièrement concerné par les problématiques développées et éclairées par lui : il me parle des « impensés » culturels comme peu de gens l'ont fait jusqu'ici – tout au moins pas avec une telle intensité intellectuelle et simplicité de langage. 

 

Sa connaissance intime de la Chine lui permet de traiter une palette étendue de sujets autour de ce pays : cosmologie, philosophie, sociologie, et quand il en parle, son propos est précis et argumenté, sans approximation. Le livre « 100 mots pour comprendre les Chinois » ne fait pas exception. Cet ouvrage, qui n’est pas un manuel pour apprendre la langue chinoise, pas plus qu'un dictionnaire, peut être lu aussi bien par les lecteurs sans la moindre connaissance de cette langue, que par ceux qui ont le chinois comme langue maternelle. Par son approche « anthropologique », ce livre nous rappelle une vérité simple : l’apprentissage des mots donne la clef non seulement de la maîtrise d’une langue, mais aussi de la compréhension d’une vision du monde, et ouvre la possibilité de « converser » fraternellement avec les gens qui parlent cette langue. Quelle serait la finalité de la connaissance d’une langue, si ce n’était pas celle-là ?

13/09/2008

Fête de la mi-automne

EL_Chang-E.jpgDepuis la dynastie des Tang (VIIIe siècle), la fête de la mi-automne est célébrée le 15e jour du huitième mois lunaire, qui précède toujours une nuit de pleine lune. Pour les Chinois, la lune paraît particulièrement belle et brillante à cette date. Tellement belle qu'il serait triste de la contempler tout seul. A l'image de la lune qui recouvre sa forme pleine, la famille se réunit pour la fête, non sans une certaine mélancolie : dans la vie, les êtres aimés nous manquent trop souvent, et les retrouvailles sont aussi rares que la plénitude de la lune paraît exceptionnelle.

Image extraite de l'album Lunes de Chine (éd. HongFei Cultures, 2007)


» la légende de Chang'E s'envolant dans la lune

» la légende du Vieillard-sous-la-Lune

06/09/2008

Hospitalité [2]

Nous pouvons considérer que la sensibilité universaliste des Chinois s'exprime dans une autre phrase qui n'est pas moins souvent citée : « Entre les quatre mers, tous les hommes sont [mes] frères. » 

Cette phrase est extraite du chapitre XII des Entretiens de Confucius. Un homme nommé Sima Niu se lamente de ne plus se reconnaître dans la conduite dévoyée de ses frères. Il considère les avoir perdus et se sent seul au monde. Zi Xia, l'un des disciples de Confucius, le console ainsi :

«... L'homme honorable veille sans cesse sur sa propre conduite ; il est respectueux et civilisé. Entre les quatre mers, tous les hommes sont ses frères. L'homme honorable a-t-il lieu de s'affliger de n'avoir plus de frères ? »

 

Ainsi, se perfectionner dans la vertu procure au sujet une récompense concrète et palpable : un monde peuplé de ses frères. L'homme offrira et recevra l'hospitalité ainsi en toute sérénité.

 

 

» le site de l'AFPC (Association Française des Professeurs de Chinois)

28/08/2008

Hospitalité [1]

La cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Pékin a été une occasion de recentrer notre regard sur la civilisation chinoise. Si l'on ne se contente pas de commentaires de presses mal informés ou biaisés par les idéologies, on peut effectivement y "entendre" le message qu'une nation voudrait porter au monde. Cette occasion est d'autant plus précieuse que la nation en question, la Chine, a souvent été - et l'est encore aujourd'hui - admirée ou méprisée en Occident pour de mauvaises raisons. 

Entendons-nous l'une des phrases souvent citées par les Chinois autour de l'événement : « N'éprouve-t-on pas de la joie avec des amis venant de loin ? » Cette phrase est extraite du premier paragraphe du premier chapitre des Entretiens de Confucius.

Pour sa traduction, j'ai consulté la proposition de deux références françaises sans être satisfait. Après avoir lu une version anglaise et une transcription en chinois moderne, je considère que celle proposée ci-dessus ne trahit pas le sens du texte d'origine. Au-delà de la traduction d'une seule phrase, il convient de la lire dans le contexte des trois phrases qui se suivent :

 

Le maître dit :

N'est-ce pas un plaisir d'apprendre et de mettre sa connaissance en application au moment opportun ?

N'éprouve-t-on pas de la joie avec des amis venant de loin ?

N'est-ce pas un homme de bien qui, incompris des autres, garde son esprit serein ?

 

La première phrase parle du rapport à soi : être homme, c'est avoir la faculté d'apprendre et de s'élever dans sa condition humaine. La deuxième phrase parle du rapport aux autres : un être qui arrive de loin, pourvu qu'il partage tes exigences et aspirations, peut parfaitement être ton ami. La troisième phrase propose une synthèse : il ne faut pas être désabusé même si la rencontre avec l'être partageant tes exigences et aspirations tarde à se concrétiser.

L'un des charmes de l'hospitalité à la chinoise consiste à voir une amitié potentielle dans chacun des arrivants.

 

» le site de l'AFPC (Association Française des Professeurs de Chinois)

05/07/2008

Le ciel est à vous

C'était la journée rencontres professionnelles des Gobelins, l'école de l'image. Hsiao-Han YAO, graphiste free-lance, termine son année de formation en graphisme. Avant sa période Gobelins, elle avait déjà quelques ouvrages à son actif comme auteur ou comme designer visuel. Cette année a vu ses expressions s'épanouir parallèlement à sa participation aux projets de HongFei Cultures : l'air libre de Paris n'y est pas pour rien. Nous lui adressons nos meilleurs vœux pour un envol en beauté.

 

De même pour les jeunes talents rencontrés de cette journée.

26/06/2008

Question de point de vue

EL_CB_London_20080626.JPGEn sortant de la gare Saint Pancras de Londres, j'avais deux heure à perdre entre deux trains. Devant la gare, sur un poteau, une petite affiche annonçait l'ouverture d'une exposition sur la nouvelle architecture londonienne, avec un plan sommaire indiquant le trajet piéton pour s'y rendre. Marcher dans les rues londoniennes par un matin doux et ensoleillé, pour voir une exposition sur l'architecture : c'était le bonheur parfait.

Dans la salle d'exposition, sur un tableau noir était inscrite la question de la semaine : « Quel est selon vous le bâtiment ou l'endroit le plus romantique de Londres ? » Les visiteurs étaient invités à y laisser leur réponse. Parmi les réponses données, la seule qui m'a marqué et qui m'a fait rire se lit ainsi : « Saint Pancras... parce que cela veut dire que je suis sur le point de partir pour Paris !!! »

Je racontai ça à un ami anglais. Sa réaction fut immédiate : « Oh ! Il faut être Français pour écrire une chose pareille ! »

Image : "Camera obscura", exposition temporaire, V&A Museum, Londres 2005

08/06/2008

Aujourd'hui, la pointe d'été.

Les fêtes traditionnelles en Chine sont étroitement liées au cycle annuel de la vie paysanne. En effet, au gré de la naissance et la disparition des dynasties, il n'y a pas d'homme assez grand pour marquer le calendrier du peuple chinois d'une empreinte indélébile. Seules les saisons le peuvent.

 

Ainsi, l'été en Chine se signale au cinquième jour du cinquième mois lunaire, dit Duanwu jie 端午節 (fête de la pointe d'été). En pratique, des rituels élaborés dans le temps doivent protéger les vivants des épidémies que favorise l'arrivée des chaleurs : on décore les portes d'entrée avec des herbes protectrices comme l'armoise et l'effigie de Zhongkui, un dieu pourfendeur de démons.

 

Mais toutes les fêtes sont aussi d'excellentes occasions pour "réviser" et actualiser le système de SYMBOLES et de valeurs hérité de nos ancêtres. Ainsi, la tradition veut qu'au jour de Duanwu, le soleil arrive au zénith et que l'énergie yang (principe masculin, opposée à l'énergie yin, principe féminin) atteigne son apogée. Il n'est donc pas étonnant qu'on ait choisi cette date pour organiser les courses de bateaux-dragons. Le mouvement orchestré des rameurs offre alors un spectacle des forces masculines aux riverains.

 

L'attrait de cette fête s'enrichit de bien d'autres célébrations encore, comme la dégustation de zongzi (riz gluant fourré et enveloppé dans des feuilles de bambous, cuit à la vapeur) en hommage à QU Yuan, un poète de l'antiquité. La représentation théâtrale de la légende du serpent blanc ne peut qu'augmenter l'appétit.

 

En 2009, la pointe d'été se fêtera le 28 mai.

24/05/2008

Eurovision : tel un oiseau migrateur

EL_CB_Budapest_200806.jpgCette année, il a atterri là ; l'année suivante, ailleurs. C'est vrai que ça fait longtemps qu'il n'a pas posé ses pattes en France, mais ce n'est pas une raison pour ne pas l'aimer. Si l'on peut regretter que les votes soient parfois motivés par des critères étrangers à la qualité de la prestation des artistes, ils semblent néanmoins refléter une certaine dynamique migratoire de l'Europe actuelle, et ce notamment concernant l'Est.

 

Enfin, l'Europe est grande justement parce que tout le monde n'est pas Français sur ce "continent". J'aime l'Europe certes pour son sens de l'hospitalité, mais peut-être encore plus pour l'air cosmopolite qu'on y respire, au bord du Danube.

 

Image : Derrière le Parlement, Budapest 2005

16/05/2008

Trois heures et demie : après le tremblement de terre à Sichuan

Depuis lundi, nous suivons attentivement les informations sur le tremblement de terre dans la province de Sichuan au centre de la Chine, en particulier celles provenant de Taïwan en langue chinoise, plus abondantes que celles disponibles en langue française. Les chiffres estimés de morts et de disparus restent fluctuants. La ville préfecture de Beichuan qui comptait 30 000 habitants dans la région montagneuse a littéralement sombrée dans la terre et disparu de la carte.

 

Notre pensée va d'abord aux familles endeuillées. Un tremblement de terre de cette violence, ça crée beaucoup, beaucoup d'orphelins, et de parents sans descendant. Nous nous sentons proches de ces familles dans leur douleur. La philosophie chinoise enseigne l'inconstance de notre existence dans ce monde, et c'est le partage de cette "fragilité" qui nous unit, dans une compréhension humble, profonde et sans parole. La culture chinoise nous a aussi et surtout enseigné la force d'esprit que l'on peut faire naître de cette fragilité. Ces épreuves nous appellent à être dignes héritiers de cette culture humaniste.

 

Hier, trois avions charters ont effectué un vol direct entre Taïwan et le Sichuan, pour y livrer des vivres et équipements de sauvetage et pour évacuer des touristes et résidants taïwanais atteints par la catastrophe. Trois heures et demie de vol, sans escale, depuis Taipei jusqu'à Chongqing et Chengdu. Trois heures et demie, après soixante années ou presque de séparation : c'est une première depuis 1949, année où l'Île de Taïwan se sépara du continent chinois suite à la guerre civile.

 

Dans ce moment douloureux, nous saluons sincèrement ce lien retrouvé, et invitons nos amis français à "créer des liens" de dialogue et de compréhension envers la Chine, cet immense "Continent d'esprit".

 

» lire l'article de James Reynolds, un reporter de BBC à Pékin